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TECHNOLOGIE DU FUTURE
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15 février 2015

Les ondes magnétiques au secours des dépressions résistantes

La dépression est devenue un enjeu de santé publique. Même si la prise en charge a bénéficié de nombreux progrès, certains patients sont en échec de traitement. Depuis peu, une alternative prometteuse existe : la stimulation magnétique transcranienne. Pouvant être pratiquée sans hospitalisation, elle bénéficie depuis peu d'outils lui offrant une meilleure efficacité.

Quand la psychothérapie et les antidépresseurs s'avèrent inefficaces, les électrochocs peuvent être envisagés. Mais une solution moins lourde apparaît aujourd'hui : la stimulation magnétique transcranienne.

Les dépressions résistantes aux traitements

Selon une enquête réalisée en 2005 par l'Institut national de prévention et d'éducation en santé (Inpes) 1, 8 % des Français de 15 à 75 ans (soit près de 3 millions de personnes) ont vécu une dépression au cours des douze derniers mois. Et 19 % des Français de 15 à 75 ans (soit près de 8 millions) ont vécu ou vivront une dépression au cours de leur vie. Si elle touche plus souvent les femmes (deux fois plus), elle peut néanmoins frapper sans distinction d'âge, de classe sociale ou de sexe.

Sa prise en charge repose sur des psychothérapies et traitements médicamenteux (antidépresseurs). Mais quand cette prise en charge ne suffit pas, les médecins disposent de peu d'alternatives : changer de médicaments, les associer, recourir aux sismothérapies (plus connues sous le nom d' électrochocs), la stimulation du nerf vague (qui reste controversée) ou la stimulation cérébrale profonde, qui reste du domaine expérimental.

Récemment, une nouvelle piste est apparue : la stimulation magnétique transcranienne (ou TMS pour Transcranial Magnetic Stimulation) 2 avec une efficacité de 30 à 50 % sur ces dépressions résistantes.

L'apport de la stimulation magnétique transcranienne

Comme le ferait une stimulation cérébrale classique, la stimulation magnétique transcranienne permet de stimuler des zones du cerveau précises, en évitant le caractère invasif (pas besoin d'opération). Comment ? En appliquant à travers le crâne une impulsion magnétique sur le cerveau, grâce à une bobine placée à la surface de la tête. "Les champs magnétiques créés induisent alors un champ électrique qui modifie l'activité des neurones situés à proximité. L'utilisation la plus courante est la stimulation répétitive dite rTMS : on stimule une zone précise pendant un intervalle de temps donné, de manière à modifier sensiblement l'activité de la région visée" précise Pierre Hellier, chargé de recherche à l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) 3,4.

Pour cette application, la zone à stimuler est le cortex préfrontal dorsolatéral gauche. Cette cible a été choisie après que des études en neuro-imagerie aient montré une baisse de son activité chez des patients déprimés, et que des études chez l'animal aient montré qu'une stimulation magnétique de cette zone entraînait la libération de dopamine, une substance chimique impliquée dans le désir, la sensation de plaisir, etc. Comment la localiser avec précision ? La technique la plus courante consiste à repérer la zone dont la stimulation par TMS entraîne une contraction du pouce et à mesurer 5 cm avec un mètre de couturier vers l'avant du crâne pour cibler la zone recherchée 5. On comprend aisément que cette méthode empirique manque un peu de précision… "Ce qui est regrettable sachant qu'on sait aujourd'hui que la précision du positionnement conditionne le succès de la thérapeutique 6. L'enjeu était donc de pouvoir offrir un système de neuronavigation, sorte de GPS dédié au cerveau" avoue Pierre Hellier.

La TMS plus efficace et plus précise grâce à un système de neuronavigation

Aujourd'hui, l'imagerie médicale nous permet d'avoir un aperçu très précis de l'activité cérébrale. Pourquoi ne pas se servir des atouts de l' IRM pour mieux positionner la TMS ? Pour des patients dépressifs, les séances quotidiennes à l'hôpital (dix au minimum) et la nécessité de recourir à un cadre stéréotaxique (on fixe un cadre sur la tête des patients afin de l'immobiliser) rendaient la prise en charge inadaptée… Impliqué dans des systèmes de neuronavigation appliquée à la chirurgie neurologique 7, Pierre Hellier a mis au point un système dédié à la TMS qui peut être utilisé en routine.

Concrètement, le patient passe une IRM durant laquelle la zone à stimuler est clairement identifiée par un neuroanatomiste. Ensuite, pendant les sessions de stimulation, une caméra binoculaire permet de suivre en temps réel et en 3D, un bandeau fixé sur la tête du patient et la bobine de stimulation. Six points caractéristiques sont repérés sur l'IRM du patient et sur son crâne. Ces points permettent de mettre en correspondance les deux repères. "Tout comme un système GPS, la caméra binoculaire (le satellite) permet de suivre la bobine (la voiture) et d'en afficher la position sur l'imagerie IRM de référence (la carte routière). Au final, on est capable de cibler avec précision une zone de 2 cm 2, ce qui avec la méthode du mètre de couturier était absolument impossible" précise Pierre Hellier. Dans le cadre d'un partenariat avec l'Inria, le système est commercialisé par la société Syneika, qui a obtenu pour son neuronavigateur le marquage CE. Malgré son coût important, plusieurs hôpitaux en sont déjà équipés.

L'aventure scientifique n'est pas terminée pour autant. Aujourd'hui, Pierre Hellier travaille à la mise au point d'un système de neuronavigation basée sur des atlas d'imagerie cérébrale. "On dispose aujourd'hui d'atlas anatomiques s'appuyant sur de très nombreuses données d'imagerie. L'idée serait ainsi de trouver parmi cette base de données, celles qui correspondent le mieux à l'anatomie du patient afin de déterminer la zone à stimuler. L'idée est de faire ainsi l'économie de l'IRM" précise Pierre Hellier. D'autres questions restent cependant en suspens. Malgré une efficacité démontrée, le mécanisme d'action de la TMS reste en grande partie méconnu. Pour mieux les comprendre, les chercheurs en imagerie, en information et en médecine devront travailler ensemble. Leurs découvertes permettront d'en savoir plus sur le cerveau, l'un des derniers mystères de notre organisme.

Sources :

1- La dépression en France - Enquête Anadep 2005
2 - La stimulation magnétique transcranienne (TMS) a été utilisée dans le cadre d'études pour prendre en charge la migraine, les troubles obsessionnels compulsifs, les hallucinations liées à la schizophrénie…
3- Les Comptoirs de l'Inria- Interview de Pierre Hellier, le 6 avril 2011
4 - Le champ magnétique délivré par la bobine a une portée de 2 cm. La zone stimulée est donc relativement superficielle, en moyenne à 1,6 cm en profondeur du cuir chevelu.
5 - Psychopathologie et neurosciences : Questions actuelles de neurosciences cognitives et affectives de Emmanuel Streel, Salvatore Campanella, Collectif et Henrique Sequeira- Editions De Boeck- 384 pages- 32,50 €
6 - The effects of repetitive transcranial magnetic stimulation in the treatment of depression. - Fitzgerald PB, Daskalakis ZJ - Expert Rev Med Devices. 2011 Jan;8(1):85-95. ( abstract accessible en ligne)
7- Les outils de neuronavigation 3D temps réel mis au point par des chercheurs de l'équipe-projet VisAGeS commune à l'INRIA et à l'INSERM, et des psychiatres du CHS Guillaume Régnier de Rennes, constituent l'étape initiale qui a permis la concrétisation de cet outil spécialement dédié à la TMS.

http://www.doctissimo.fr/html/dossiers/depression/articles/15048-ondes-magnetiques-contre-depression.htm

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