Un jour, les paralysés remarcheront

Permettre aux paralysés de marcher de nouveau, ce n’est plus qu’une question de temps. La recherche a encore fait de grands pas dans ce sens. En 2012, des chercheurs parvenaient à refaire marcher des rats paralysés, la nouvelle avait fait sensation. Cette fois-ci, en utilisant des stimulations électriques sur la colonne vertébrale, la technique a fonctionné sur des humains.

Dustin Shillcox aimait pratiquer la motoneige, le ski nautique et l’équitation près de sa ville natale de Green River (USA). Mais le 26 août 2010, alors qu’il avait 26 ans, l’homme a été victime d’un malheureux accident de voiture suite à l’explosion d’un pneu. Il s’est cassé le dos, le sternum, le coude et quatre côtes. Si de nombreuses parties de son corps ont pu guérir avec le temps, il devint évident après plusieurs mois qu’il resterait sur un fauteuil roulant : impossible de mouvoir la partie inférieure de son corps.

Quand on est paralysé, le monde change : un escalier à prendre et vous ne pouvez plus continuer sans l’aide d’un ami. En 2011, l’homme a entendu que des expériences avaient permis de faire tenir debout Rob Summers, 23 ans, également paralysée des membres inférieurs.

La neuroscientifique Susan Harkema avait utilisé des stimulations électriques afin de « réveiller » la zone inférieure de la moelle épinière de l’homme. Dès les premiers jours des essais, il fut capable de se lever et de supporter tout son poids avec seulement une aide mineure pour rester en équilibre.

Normalement, pour des personnes comme Shillcox, le diagnostic est sans appel. Perdre espoir n’était toutefois pas dans sa nature et il fut sélectionné en juillet 2012 pour participer à un programme de 18 mois d’expériences avec Susan Harkema et 3 autres volontaires. On sait depuis les années 70 que l’on peut faire bouger les jambes d’une personne par une stimulation électrique directe. Edgerton et d’autres chercheurs ont démontré le concept chez les rats paralysés, et quelques humains. Ce qu’ils ont mis du temps à comprendre, c’était le problème de « sur-stimulation » des neurones. Cela sature le système pour la mise en mouvement.

En effet, la moelle épinière ne fait pas qu’interpréter le signal du cerveau, il y a une « boucle rétroactive » entre les deux organes qui permet la stabilité et la coordination. On a donc fini par utiliser des neurostimulations, l’envoi de signaux électriques à la moelle épinière. On stimule à peine ce qu’il faut et l’organisme qui est alors « réveillé » fait le reste. Shillcox a bénéficié de ce traitement innovant en février dernier. Grâce à des électrodes bien placées et au bout de nombreux essais, il parvint à son tour à se tenir seul debout.

Susan a tenté de nombreuses configurations d’électrodes, car il existerait un seuil de tension pour « prendre le contrôle » des zones paralysées. Le système à mettre au point va donc demander de nombreuses optimisations. En effet, chaque patient va répondre différemment aux stimulations. Or, il faut prédire ses réactions, car on ne pourra pas accorder le même temps d’optimisation qu’on ne l’a fait pour le prototype.

Shillcox le sait, il n’arrivera pas au miracle du jour au lendemain, mais chaque prise de contrôle sur le bas de son corps est une victoire qui lui redonne de l’espoir.